L’hirudothérapie, vous connaissez ?

sangsues

Avez-vous déjà pensé à vous faire sucer le sang ?

Non, je ne vous parle pas de Dracula, mais d’hirudothérapie. Vous connaissez ?

C’est le nom scientifique donné à la thérapie par sangsues médicinales (dont le nom latin est… hirudo).

Cet animal mal-aimé est souvent associé dans notre imaginaire aux marais et au danger.

Mais en vérité, nos ancêtres égyptiens l’utilisaient déjà comme remède.

Aujourd’hui, je vais vous aider à faire la part entre mythe et réalité au sujet de ce ver peu reluisant.

Des pharaons à la Révolution : elles sont partout !

Les premières références à l’utilisation de sangsues remontent à l’Égypte antique, où elles étaient utilisées pour éliminer les impuretés du sang, favorisant ainsi la santé globale.

Dans l’Inde ancienne, les sangsues étaient intégrées à la pratique de l’Ayurveda. Elles étaient utilisées pour équilibrer les doshas, les forces vitales qui gouvernent le corps et l’esprit.

Côté Europe, les médecins grecs, tels qu’Hippocrate, croyaient que l’équilibre des fluides corporels était essentiel à la santé. Les sangsues pouvaient donc purifier le corps des « mauvais » fluides.

Pendant le Moyen-Âge, l’hirudothérapie a gagné en popularité en Europe, notamment pour soigner les thromboses et les hémorroïdes.

À l’époque de la Révolution française, on manquait cruellement de chirurgiens. Aussi, les médecins utilisaient à la place des sangsues pour réaliser les saignées. Pratique !

La France était même devenue, à cette époque, la plus grande consommatrice de sangsues au monde !

Mais toute bonne chose a une fin.

Comment la science moderne a condamné les sangsues

Toutefois, avec des techniques de désinfections de Louis Pasteur, les médecins ont rejeté l’usage de la sangsue désormais considérée comme vecteur de germes.

En 1938, elles ont carrément disparu du Codex français et par conséquent de nos pharmacies. Les pays voisins ont suivi le mouvement.

Elles faisaient pourtant encore partie de la pratique médicale naturelle. Et certains nostalgiques continuaient à les utiliser. Ainsi, en 1949, un article les recommanda pour les états congestifs et inflammatoires.

Mais globalement, l’arrivée des molécules de synthèse a mis l’hirudothérapie au pilori. Et entaché la réputation des sangsues médicinales.

Un retour à la mode bien légitime

Heureusement, depuis quelques années, la sangsue retrouve les faveurs de la médecine, et plus précisément celles de la chirurgie.

En effet, elle a été introduite dans les services de chirurgie plastique et traumatologique des hôpitaux et cliniques, en France et en Suisse.

Les études cliniques des 10 dernières années ont en effet démontré les bienfaits des sangsues. Et en particulier leur salive, qui contient une substance unique : l’hirudine.[1]

Cette substance agit comme un anticoagulant naturel en empêchant la coagulation excessive du sang. Cette propriété peut être bénéfique pour les personnes souffrant de thromboses veineuses profondes ou d’autres problèmes de circulation sanguine.

Pour le reste, soyons prudents

Comme toute pratique ancienne, l’utilisation des sangsues a été enveloppée de croyances erronées au fil des siècles.

Examinons de plus près les mythes les plus courants et les vérités qui se cachent derrière l’hirudothérapie.

Mythe : les sangsues aspirent le « mauvais sang »

L’un des mythes les plus répandus sur l’hirudothérapie est que les sangsues sucent le « mauvais sang » du corps, laissant derrière elles un sang purifié.

En réalité, lorsqu’elles se fixent à la peau et commencent à sucer le sang, elles provoquent une augmentation du flux sanguin vers la zone concernée. Cela peut être bénéfique pour la guérison de blessures, car un meilleur apport en nutriments et en oxygène favorise la régénération des tissus endommagés. Mais ça s’arrête là…

Mythe : l’hirudothérapie peut tout guérir

Un autre mythe persistant est que l’hirudothérapie est une solution miracle capable de guérir une multitude d’affections, des problèmes cutanés graves aux maladies chroniques. Bien que l’hirudothérapie puisse apporter des avantages réels, elle ne peut pas guérir toutes les maladies. Il est important de la considérer comme une approche complémentaire plutôt que comme une solution universelle.

Réalité : un complément à la médecine moderne

L’hirudothérapie peut être un ajout précieux aux traitements médicaux conventionnels, en particulier pour des problèmes tels que l’arthrose, les troubles musculo-squelettiques et la récupération post-opératoire.

Mythe : l’application de sangsues est douloureuse

La plupart des gens craignent la douleur lors de l’application des sangsues. Bien qu’elles puissent vous repousser, les sangsues modernes sont en principe utilisées dans un cadre contrôlé et leur application est généralement indolore. De plus, la sécrétion d’hirudine peut en fait agir comme un analgésique local et soulager la douleur.

Réalité : La procédure est ultra-contrôlée

Les praticiens qualifiés assurent que l’application des sangsues est réalisée de manière contrôlée[2]. Les sangsues sont d’ailleurs issues d’élevages prévus pour l’utilisation médicale. La sangsue n’est jamais retirée de force (ce qui pourrait causer une infection bactérienne par régurgitation du contenu de son estomac). Enfin, les sangsues sont détruites après utilisation.

En conclusion, les sangsues ne devraient plus vous faire peur. Utilisées en environnement médical, elles sont très utiles pour soulager les hématomes et les problèmes de circulation sanguine.

Et vous, avez-vous déjà essayé les sangsues ?

À bientôt,

Laurent

[1] Danjou C. Utilisation des parasites en thérapeutique. [Lille]: Faculté des Sciences Pharmaceutiques et Biologiques de Lille; 2017.

Joslin J, Biondich A, Walker K, Zanghi N. A Comprehensive Review of Hirudiniasis: From Historic Uses of Leeches to Modern Treatments of Their Bites. Wilderness & Environmental Medicine. 2017, 28(4):355 61. Lui C, Barkley T. Medicinal leech therapy : New life for an ancient treatment. Nursing. 2015, 45(11):25 30.

[2] https://www.hug.ch/procedures-de-soins/application-sangsues-usage-medical-ou